ATELIER D’ ÉCRITURE DE REGUSSE
28 juin 2016
LA LETTRE…
1) Dorothée nous lit quelques passages du livre d’Abdellatif Laâbi dans lequel il écrit de sa prison des lettres à sa famille. Puis elle nous demande d’inscrire sur des petits papiers cinq mots qui nous font penser à ECRITURE.
Ces papiers sont ensuite mélangés dans une boite.
2) Nous devons rédiger une lettre qui commencera par » Je t’écris… » et dans laquelle nous incorporerons tous les mots au fur et à mesure de leur tirage au sort.
Les mots: Plénitude, pensées nouvelles, se confier, écrire, apprendre, imaginer, livre, calligraphier, critiquer, jouer, histoire, scribe, ressentir, raconter, surprise agréable, dévoiler, univers, la vie, se balader, beauté, participer, divulguer, silence, encre, créer, joie, se souvenir, besoin, découverte des autres, voir, idées d’avenir, lire, témoigner, sagesse, se vider, communiquer.
Ma lettre: » Je t’écris. » Pourquoi ? Ai-je quelque-chose à te dire ? Voudrais-je m’évader enfin vers un autre univers ? Les couleurs de la vie sont si improbables. Il faut faire preuve de tant d’imagination que sortir de mon histoire est comme calligraphier un chapitre d’une autre existence. Il faudrait pouvoir se souvenir, témoigner des instants heureux de notre existence apprise à deux, ensemble. A ces moments vécus, la communication était si parfaite. Mais ai-je besoin de me remémorer le bonheur alors que nos cœurs se vident de tout sentiment ? Les critiques fusent maintenant si souvent qu’il devient impossible d’écrire la vie, la vie avec un grand V majuscule. Lorsque notre univers s’effondre comme aspiré par un trou noir, proscrivant toute création, nous forçant à refuser de voir les plaisirs vécus à deux comme un livre que l’on referme, annihilant ainsi toute redécouverte de l’autre, peut-on et doit-on encore se confier ? Pourquoi ne pas plutôt souffrir en silence devant le lourd bilan d’une longue existence vécue sans sagesse. La plénitude des premières décades était emplie d’un bonheur parfait, encore dans l’ignorance d’un avenir déchirant dont seront faites les années à venir. Arrêtons de jouer l’un avec l’autre et de se raconter des mensonges, des abominations inventées pour assouvir une soif de vengeance perfide. Tentons une dernière fois de s’offrir une surprise agréable, une joie, un cadeau de dernier recours dévoilé enfin pour se faire plaisir, pour nous faire plaisir. Réinventons ainsi un début de bonheur, même s’il est difficile de se l’écrire, comme un scribe sans encre gravant une planchette rigide. Baladons-nous une dernière fois en nous laissant la chance de communiquer, comportons-nous en adultes conscients d’une catastrophe imminente, et réinventons une nouvelle histoire pleine de bons sentiments. Excluons la haine et l’indifférence. Participons ensemble à la reconstruction d’un plaisir si longtemps partagé et qui avait prématurément quitté nos deux cœurs devenus insensibles. Ce défi réussi sera d’une telle beauté qu’il transcendera notre amour, nous rendra invincibles, tels ces philosophes qui ont dans le passé réinventé le monde par leurs pensées nouvelles.